J.O. Numéro 178 du 4 Août 1999
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Texte paru au JORF/LD page 11797
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Avis rendu par le Conseil d'Etat sur des questions de droit posées par un tribunal administratif ou une cour administrative d'appel (1)
NOR : CETX9903696V
Le Conseil d'Etat statuant au contentieux (section du contentieux, 2e et 6e sous-sections réunies),
Sur le rapport de la 2e sous-section, de la section du contentieux,
Vu, enregistré le 14 décembre 1998 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, l'arrêt du 10 décembre 1998 par lequel la cour administrative d'appel de Nancy, avant de statuer sur l'appel de la société France Télécom tendant à l'annulation du jugement du 5 mai 1998 par lequel le tribunal administratif de Nancy, sur la demande du syndicat Sud-PTT 54, a annulé la décision du directeur régional de France Télécom de Nancy regroupant l'ensemble des agents de l'unité Infrastructures-réseau sur le site de Champigneulles, a décidé, par application des dispositions de l'article 12 de la loi no 87-1127 du 31 décembre 1987 portant réforme du contentieux administratif, de transmettre le dossier de cet appel au Conseil d'Etat, en soumettant à son examen les questions suivantes :
1o L'article 29-1 de la loi du 2 juillet 1990, introduit par la loi du 26 juillet 1996 et créant un comité paritaire auprès du président de France Télécom, a-t-il eu pour effet d'abroger implicitement les dispositions de l'arrêté du 28 juillet 1983 en tant qu'il institue un comité technique paritaire auprès de chaque direction régionale des télécommunications ?
2o En cas de réponse affirmative à la question précédente, les attributions du comité paritaire, telles qu'elles sont fixées par l'article 29-1 de la loi du 2 juillet 1990 et l'article 6 du décret du 27 décembre 1996, doivent-elles être regardées comme s'appliquant aux mesures de réorganisation dont l'étendue n'excède pas le ressort d'une direction régionale de France Télécom ?
....................
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu la loi no 83-634 du 13 juillet 1983 ;
Vu la loi no 84-16 du 11 janvier 1984 ;
Vu la loi no 90-668 du 2 juillet 1990, modifiée par la loi no 96-660 du 26 juillet 1996 ;
Vu le décret no 82-452 du 28 mai 1982 ;
Vu le décret no 92-451 du 21 mai 1992 ;
Vu le décret no 96-1179 du 27 décembre 1996 ;
Vu les articles 57-11 à 57-13 ajoutés au décret no 63-766 du 30 juillet 1963, modifié par le décret no 88-905 du 2 septembre 1988 ;
Vu le code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel ;
Vu l'ordonnance no 45-1708 du 31 juillet 1945, le décret no 53-934 du 30 septembre 1953 et la loi no 87-1127 du 31 décembre 1987, notamment son article 12 ;
Après avoir entendu en audience publique :
- le rapport de M. Ribadeau Dumas, auditeur ;
- les observations de Me Delvolvé, avocat de France Télécom ; - les conclusions de M. Honorat, commissaire du Gouvernement,
Rend l'avis suivant :
1o Aux termes de l'article 9 de la loi du 13 juillet 1983 susvisée portant droits et obligations des fonctionnaires : « Les fonctionnaires participent par l'intermédiaire de leurs délégués siégeant dans les organismes consultatifs à l'organisation et au fonctionnement des services publics (...) » ;
S'agissant de la fonction publique de l'Etat, l'article 15 de la loi du 11 janvier 1984 dispose que : « Dans toutes les administrations de l'Etat et dans tous les établissements publics de l'Etat ne présentant pas un caractère industriel ou commercial, il est institué un ou plusieurs comités techniques paritaires. Ces comités connaissent des problèmes relatifs à l'organisation et au fonctionnement des services (...) ». L'article 17 de la même loi renvoie à un décret en Conseil d'Etat le soin de déterminer la compétence, la composition, l'organisation et le fonctionnement des comités techniques paritaires, ainsi que les modalités de désignation de leurs membres. En application du décret ainsi prévu en date du 28 mai 1982, maintenu en vigueur et modifié par celui du 25 octobre 1984, les comités techniques paritaires de l'administration des postes et télécommunications ont été institués par un arrêté interministériel du 28 juillet 1983, dont l'article 6 crée notamment de tels comités auprès des directeurs régionaux des télécommunications.
La loi du 2 juillet 1990 qui érige France Télécom en personne morale de droit public dispose en son article 29 que les personnels de cet « exploitant public » sont régis par des statuts particuliers pris en application des lois du 13 juillet 1983 et du 11 janvier 1984. L'article 36 de la même loi prévoit l'existence d'un comité technique paritaire placé auprès du directeur général de France Télécom. L'organisation et le fonctionnement de ce comité ont été fixés par le décret no 92-451 du 21 mai 1992 relatif au comité technique paritaire de France Télécom qui ne prévoit pas le maintien des comités techniques paritaires locaux alors en place et doit être regardé comme s'étant entièrement substitué à l'arrêté interministériel du 28 juillet 1983, dont les dispositions ont été ainsi implicitement abrogées avant même l'intervention de la loi du 26 juillet 1996 modifiant la loi du 2 juillet 1990 ;
2o La loi no 96-660 du 26 juillet 1996 modifiant la loi du 2 juillet 1990 a transformé France Télécom en société anonyme. Aux termes du second paragraphe de l'article 29-1 qu'elle introduit dans la loi du 2 juillet 1990 : « En vue d'assurer l'expression collective des intérêts du personnel, il est créé auprès du président de France Télécom, par dérogation à l'article 15 de la loi no 84-16 du 11 janvier 1984 portant dispositions statutaires relatives à la fonction publique de l'Etat, un comité paritaire. Ce comité est informé et consulté, notamment sur l'organisation, la gestion et la marche générale de l'entreprise, ainsi que sur les questions relatives au recrutement des personnels et les projets de statuts particuliers. (...) Un décret en Conseil d'Etat précise les attributions et les modalités de fonctionnement de ce comité, ainsi que sa composition. » Le décret no 96-1179 du 27 décembre 1996 relatif au comité paritaire de France Télécom, pris pour l'application de ces dispositions, prévoit que ce comité est consulté notamment sur l'organisation de l'entreprise, la gestion et la marche générale de celle-ci, ainsi que sur l'organisation du travail.
Eu égard à la généralité de ces attributions et à la circonstance que la loi du 26 juillet 1996 introduit également dans la loi du 2 juillet 1990 un article 31-1 qui prévoit que France Télécom doit établir des instances locales de concertation, consultées notamment sur l'organisation et les conditions de travail, il n'est pas légalement nécessaire de consulter le comité paritaire sur les mesures de réorganisation dont l'étendue n'excède pas le ressort d'une direction régionale de France Télécom, sauf si, par leur ampleur ou leur nature, ces mesures ont une incidence sur la marche générale de l'entreprise.
Le présent avis sera notifié à la cour administrative d'appel de Nancy, à la société France Télécom, au syndicat Sud-PTT 54, au ministre de la fonction publique, de la réforme de l'Etat et de la décentralisation et au ministre de l'économie, des finances et de l'industrie.
Il sera publié au Journal officiel de la République française.
(1) Avis no 202640 du 7 juin 1999.